Association Saint Lidoire de Tours

 

        Saint Gatien avait été un pionnier, un créateur, un défricheur ; il y avait eu des chrétiens à Caesarodunum avant son arrivée, mais on les devine seulement. Après lui, il restait à organiser, à développer, à bâtir : ce fut le rôle de saint Lidoire. Il aurait été élu en 337, si le nombre d'années que lui octroie Grégoire de Tours correspond bien à la réalité historique. C'était l'année de la mort de Constantin ; il serait donc devenu évêque la première année du règne de Constant qui devait mettre provisoirement un terme aux interventions du pouvoir impérial dans la crise arienne.


La situation générale de l'Eglise a été profondément modifiée par la conversion de l'Empereur au christianisme, même si celui-ci a différé son baptême jusqu'à ses dernières années. Une législation a été mise en place qui protège et même favorise l'Eglise. La juridiction épiscopale a été reconnue par l'Etat. Les communautés chrétiennes sont habilitées depuis 318 à recevoir des donations de personnes vivantes ou par legs ; le clergé a été exempté des charges civiques. Le jour du soleil est devenu jour férié, ce qui avantage aussi bien les sectateurs du culte de Mithra que les chrétiens (321). Entre 332 et 350, des exonérations nombreuses viennent améliorer la situation économique de l'Eglise.


Lidoire a bénéficié dans son ministère de ces mesures, mais il a connu aussi des réactions païennes très vives. L'usurpateur Magnence assurera pendant cinq années, de 350 à 355 le triomphe des tenants du paganisme en Gaule et les deux années de règne de Julien l’Apostat (361-363) seront une période très difficile, heureusement amortie en Touraine du fait de l’éloignement de l'administration centrale et de la lenteur des Communications.


Le progrès du christianisme à Tours semble avoir été important à la faveur de cette nouvelle situation. Grégoire de Tours compare implicitement les deux épiscopats de saint Gatien et saint Lidoire ; le premier n'a pas eu de succès auprès des notables et le nombre des chrétiens est demeuré réduit -le second enregistre au contraire de nombreuses conversions, et la chrétienté devient multitude, au moins à l'intérieur de la cité. II est évidemment impossible d'avancer des chiffres ; mais ce que l’on sait de l'épiscopat suivant, celui de saint Martin, semble indiquer que le paganisme ne compte plus comme force sociale dans la ville même après 371. Les réactions païennes n'ont donc pas stoppé le mouvement de conversion.


Jusqu'en 350, les provinces de l'Ouest de la Gaule restèrent paisibles ; Les rivalités de personnes, les soulèvements militaires, les incursions des germains ne l’affectèrent guère. Au plan religieux, la discrétion de Constant chargé de la partie occidentale de l'Empire, contrastait en matière religieuse avec l'interventionnisme de son frère Constance en Orient. Aussi longtemps qu'il vécut, les Eglises de Gaule se trouvèrent en marge du conflit arien, et les évêques purent se livrer en toute sécurité à leur œuvre d'évangélisation et de formation chrétienne des nouveaux convertis. C'est l'époque où saint Hilaire de Poitiers commente pour son peuple l'Evangile de saint Matthieu. Lidoire dut faire de même à Tours sur un mode mineur.


En 353, le climat se modifia brusquement : l'empereur Constance, seul maître de l’Empire et tout acquis aux ariens, se rendit en Occident pour convoquer plusieurs Conciles et y imposer la condamnation d'Athanase, patriarche d'Alexandrie, défenseur de l'orthodoxie. Il est probable que saint Lidoire ne participa pas au Concile d'Arles de 353 ; saint Hilaire lui-même ne semble pas y avoir pris part. Jusqu'alors, ces questions étaient restées en dehors des préoccupations des évêques de Gaule : saint Hilaire, théologien averti pourtant, déclare n'avoir pas eu connaissance auparavant du Credo de Nicée, en accord cependant avec la foi qu'il avait professée depuis son baptême.


L'évêque de Tours dut se trouver au synode de Paris, réuni par Hilaire de Poitiers à la fin de 355 pour exclure de la communion les évêques gaulois qui s'étaient ralliés à l'arianisme de l'empereur ; en conséquence, il est peu probable qu'il se soit rendu à Béziers au début de l'année suivante, à la convocation de Saturnin d'Arles, lorsque saint Hilaire fut sommé de comparaître en accusé et de condamner Athanase ; sur son refus, l'évêque de Poitiers fut dénoncé à l'empereur qui prononça une sentence d'exil et le déporta en Asie Mineure.

II n'est pas possible de savoir quelle part joua saint Lidoire dans la crise qui secoua toute l'Eglise d'Occident durant les années qui suivirent. L'ensemble des évêques gaulois, à quelques exceptions près, semble avoir capitulé devant les exigences impériales et donné leur adhésion à une formule de foi équivoque: Lidoire dut suivre le mouvement général, quitte à reconnaître avec ses collègues au Concile de Paris de 360 qu'il avait été circonvenu, et que sa foi profonde, comme celle de ses chrétiens, était intacte. Son épiscopat, on le voit, fut loin d'être de tout repos, et la paix de l'Eglise était toute relative.


Au cours de son épiscopat néanmoins, Saint Lidoire put entreprendre et achever la construction de son église cathédrale et de son baptistère, avec les services annexes du groupe épiscopal qui allait devenir traditionnel et que l’on connaît bien par les fouilles des villes romaines d’Afrique du Nord. L’emplacement était celui qu’occupe toujours la cathédrale dans l’angle sud-ouest de la partie fortifiée de la cité, contre la muraille mais la basilique était occidentée au lieu d'être orientée, comme Saint-Pierre de Rome et Saint-Jean-de-Latran. La lourde muraille isolait trop le quartier administratif du reste de la cité pour que saint Lidoire ne cherche pas à construire également une église, peut-être plus vaste, dans le suburbium, le faubourg ; dans la demeure vaste et confortable d'un noble de rang sénatorial, converti au christianisme, il aménagea donc un autre lieu de culte ; la maison se trouvait située près de la nécropole occidentale, probablement à l'entrée de l’actuelle rue Saint Lidoire. La " basilica " de saint Lidoire se perpétua dans le souvenir des tourangeaux grâce à une chapelle placée sous son vocable, qui fut détruite en 1357, pour permettre la construction de la nouvelle enceinte de la ville. C'est là qu'il devait être inhumé.


Ainsi les deux premières églises de Tours sont-elles contemporaines à quelques dizaines d'années près des basiliques de Rome au Latran, au Vatican et dans la Villa Sessorienne près des casernes de la Garde prétorienne, de la basilique du Saint sépulcre à Jérusalem, et des chantiers de la nouvelle capitale, Constantinople, créée par Constantin en 324 avec ses églises des douze Apôtres, de Sainte Irène et de Sainte-Sophie.


L'évêque vécut assez longtemps pour entendre parler de L’introduction en Gaule d'une innovation d'origine égyptienne et syrienne : la vie monastique ; sous le patronage de saint Hilaire de Poitiers, s'était ouvert à Ligugé un premier centre, à son retour d'exil en 360 ; mais dès avant son départ forcé vers l'Orient, son Eglise comportait un groupe d'ascètes. Tours connut, sans doute, le même phénomène, et ce serait à l'instigation du groupe et de ses sympathisants que serait due l'élection de son successeur.



            Saint Lidoire est fêté le 13 septembre.



            Saint Martin fût son illustre successeur.



            Saint Lidoire, priez pour nous.